Reed Hastings, le pdg de Netflix, a invité le fleuron du PAF à rencontrer ses équipes, en compagnie des acteurs de sa dernière production, « Orange is the New Black », lors d’une soirée au Faust.
L’arrivée du célèbre opérateur est perçue avec crainte au sein de l’audiovisuel français. Clin d’oeil événementiel, l’événement se déroule au sein d’un établissement au nom évocateur : Le Faust. Celui d’un savant ayant vendu son âme au diable pour pénétrer les secrets de la nature et jouir de tous les plaisirs interdits.
Le diable est dans les algorithmes, permettant la suggestion personnalisée de programmes en SVOD illimitée aux abonnés de Netflix. L’âme celle de l’exception culturelle, menacée par ce cheval de Troie américain susceptible de déstabiliser le financement de la création audiovisuelle française.
Si l’opérateur est courtoisement invité à y contribuer, il préfère se limiter aux coups de communication. Alors que Fleur Pellerin expliquait récemment à Reed Hasting qu’il fallait produire d’autres séries comme Marseille, une seule n’étant pas suffisante, il botte en touche d’un « je vais y penser ».
Face à l’opérateur aux 50 millions d’abonnés, la ministre dispose pourtant de quelques arguments. La législation sur la chronologie des médias est un frein à l’attractivité des offres SVOD, contraints d’attendre trois ans pour proposer les films sortis en salle, délai qui pourrait passer à deux ans pour les opérateurs finançant la création. Mais Reed Hastings, qui n’a pas manqué d’inviter les représentants de l’Hadopi, agite le spectre du piratage induit par la frustration.
Fort d’une récente levée de fonds de 400 millions de dollars, Netflix pourrait pourtant être incité à produire pour rivaliser avec les opérateurs SVOD déjà implantés en France, tels Vidéofutur, SFR-Numéricâble, ou Canal Play. Car son catalogue a besoin de programmes phares, et adaptés aux marchés domestiques. Or ces contenus sont préemptés par les acteurs sVOD français.
Ironie du sort, l’offre SVOD de Canal + comprend notamment House of Cards, production de Netflix, qui avait cédé les droits d’exploitation sur le marché français. Ce tour de passe passe en fait sourire plus d’un. Mais passé minuit, le fleuron de l’audiovisuel français regagne ses foyers. Comme autant de Cendrillons munies d’un précieux coffret : un an de Netflix offert.
Isabelle Hauw. Article publié au sein de la Lettre pro de la Radio.
Dans les coulisses de la soirée de lancement de Netflix, au Faust, Paris.